Étiquette : Commission Foi et Vie

  • Photo : Ashwin Vaswani/Unsplash

    La Conférence Mennonite Mondiale se joint aux catholiques et à toutes les autres communautés de foi de par le monde, qui sont endeuillées par la mort du pape François, ce 21 avril 2025, à l’âge de 88 ans. Il était alors en convalescence dans sa résidence Domus Sanctae Marthae après avoir été hospitalisé pour une pneumonie bilatérale.

    « Nous voulons nous souvenir de la vie du pape François avec gratitude », dit Cesar Garcia, secrétaire général de la CMM.

    « Nous voulons nous souvenir de la façon dont, par l’exemple de sa vie et par ses enseignements, il a mis en lumière des grands thèmes portés aussi par notre communauté anabaptiste : l’imitation du Christ dans son approche du pouvoir ; sa compréhension du leadership comme un service à rendre ; son engagement pour la paix ; son attention particulière pour les marginalisés, les pauvres et les migrants ; son intérêt pour l’unité de l’Eglise, comme il l’a montré dans ses relations avec les autres communautés chrétiennes et sa pratique de la synodalité ; son respect pour les différentes façons de croire ; et son attention pour la Création. Ces efforts, parmi d’autres, l’ont rendu cher pour beaucoup de frères et sœurs, tout au long de son ministère. »

    Le premier pape argentin de l’histoire de l’église, de son nom de naissance Jorge Mario Bergoglio, est né à Buenos Aires (Argentine) en 1936. Il avait une formation de technicien en chimie, avant de rejoindre les Jésuites en tant que novice en 1958. Il a été ordonné prêtre en 1969, puis évêque en 1992, archevêque en 1998 et cardinal en 2001. Il a été élu pape en 2013, étant le premier pape à prendre le nom de François.

    La vie du pape François est marquée par des « premières fois ». Il a été le premier jésuite à devenir pape, et le premier pape à venir du Sud. Il a été le premier pape à visiter la péninsule arabique, où il a cosigné un document sur la fraternité humaine et la coexistence commune, avec le Grand Imam d’Al-Azhar Ahmad Al-Tayyeb.

    Au cours de son pontificat, il a suivi l’exemple de son homonyme, dont le nom est lié à la pauvreté, la simplicité et la renonciation du pouvoir. Par exemple, le pape François a refusé de vivre dans le palais Apostolique (résidence usuelle des papes), en choisissant de vivre plutôt dans un appartement de la maison d’hôtes Domus Sanctae Marthae.

    Le pape François s’est fait l’avocat des réfugiés, des pauvres, et de la paix, prêchant fermement contre la guerre à l’occasion de nombreux conflits. Il a rédigé la première encyclique papale au sujet de l’environnement, appelée « Laudato Si« , ainsi qu’une exhortation apostolique subséquente, « Laudate Deum ». Il y avait écrit : « Tous, nous pouvons collaborer comme instruments de Dieu pour la sauvegarde de la création, chacun selon sa culture, son expérience, ses initiatives et ses capacités. »

    En octobre 2024, le Vatican avait invité une représentante de la CMM à participer à la Seizième Assemblée Générale Ordinaire du Synode au Vatican, en tant que « déléguée fraternelle ». Le synode, mené par le pape, avait pour thème la synodalité, un terme qui désigne le fait que plusieurs parties de l’Eglise se réunissent pour former ensemble le corps du Christ.

    « Le pape François a travaillé pour s’assurer que l’Eglise Catholique devienne une église qui se préoccupe des marginaux, qui n’est pas centrée sur elle-même et qui apporte un soin particulier envers les minorités (Evangelii Gaudiium, 2013). Il était déterminé à impliquer tous les baptisés dans la prise de décision et dans le travail de l’Eglise. Il a cherché à réfléchir au sujet de la synodalité avec des chrétiens d’autres communautés. », dit Anne-Cathy Graber, secrétaire de la CMM pour les relations œcuméniques. « Ses choix intentionnels de simplicité plutôt que de cérémonial ont montré une nouvelle façon, différente, d’être pape, une nouvelle manière d’approcher la gouvernance. »

    Pope Francis
  • « Il a fallu prendre son courage à deux mains : c’est un autre monde, un autre vocabulaire, une autre façon de penser. Comment apporter mes propres questions et être une invitée respectueuse tout en étant pleinement mennonite ? » Anne-Cathy Graber s’est posé ces questions en recevant une invitation à participer à la Seizième Assemblée Générale Ordinaire du Synode au Vatican en octobre 2024. 

    En tant que secrétaire de la CMM pour les relations œcuméniques depuis 2023, Anne-Cathy Graber a représenté la Conférence Mennonite Mondiale à cet événement qui dura un mois et qui comptait 16 « délégués fraternels » représentant d’autres églises et communautés chrétiennes, 8 protestantes et 8 orthodoxes. 

    Anne-Cathy Graber est pasteure mennonite itinérante, théologienne et co-directrice de la Chaire de Théologie Œcuménique à la Faculté Loyola Paris. Elle fait partie de la Commission Foi et Vie de la CMM. En outre, elle a représenté les anabaptistes au Comité du Forum Chrétien Mondial, dans la Commission Foi et Constitution du Conseil Œcuménique des Églises (2014-2022), dans le dialogue bilatéral entre la CMM et l’Église réformée. Elle est également sœur consacrée au Chemin Neuf, une communauté catholique à vocation œcuménique.  

    Le sujet était la « synodalité », qui n’est pas le mot que nous utilisons dans les églises anabaptistes, dit Anne-Cathy Graber, « mais la réalité est vraiment à l’intérieur de nos églises ». La CMM utilise souvent un autre mot théologique peu accessible, la koinonia

    Égalité et dignité  

    « J’ai été étonnée que la CMM soit invitée », dit-elle, car la CMM est une si petite église par rapport aux autres communions. « Cela montre bien la place accordée aux plus minoritaires ». 

    « En Christ, nous sommes le même corps, nous sommes égaux. » 

    L’accueil des délégués fraternels a été un gage de confiance, dit Anne-Cathy Graber, car les délégués fraternels « ont écouté chaque mot ; nous avons parfois été témoins de différences entre évêques ». 

    Autre signe d’égalité et de dignité, les délégués fraternels avaient la possibilité de s’exprimer au même titre qu’un cardinal ou un évêque. « Il était possible — en fait, c’est ce qu’ils attendaient — que je puisse poser mes propres questions, exprimer mes hésitations et partager mes propres surprises ». 

    Tout au long du processus, l’écoute mutuelle et le partage des témoignages ont été privilégiés. « Nous pouvions écouter les difficultés des autres », dit-elle. En particulier, lorsque les responsables du Moyen-Orient ont pris la parole, « nous partageons leur souffrance. Je suis très loin de leur liturgie, mais nous sommes très proches dans le Christ. » 

    Le processus a été exigeant et a pris beaucoup de temps, mais il a permis de nombreuses étapes pour ces conversations dans l’Esprit, dit-elle.  

    Une conversion est nécessaire 

    Les participants ont débattu d’une question qui se pose aussi à la CMM : « Comment éviter l’uniformité et vivre une unité qui intègre la différence ? » 

    Une réponse a été donnée et répétée : « Il n’est pas possible de vivre la synodalité sans conversion », dit Anne-Cathy Graber. « Il faut convertir notre logique, nos façons de faire, nos façons de réfléchir ».  

    Le synode a été précédé de deux jours de retraite silencieuse. Au cours de cette période de prière de repentance, « nous avons demandé pardon pour les péchés commis contre les femmes, contre la création, contre les migrants ». Cela a été la marque d’une Église qui entend les appels du monde et admet ses propres faiblesses. 

    À la fin du mois de rassemblement, le synode a produit un document pour le magistère sur la synodalité. Une fois de plus, les délégués fraternels ont été invités à proposer des amendements.  

    Il faudra du temps pour que le document soit reçu dans la pratique partout dans le monde. « C’est nécessaire », affirme Anne-Cathy Graber. « Quand quelque chose est important, vraiment fondamental, cela prend du temps ». 

    L’expérience a renouvelé son engagement en faveur de l’œcuménisme : « C’était comme une parabole : pour être vraiment l’Église, nous avons besoin les uns des autres. » 

    Même dans ce processus très structuré et formel, « j’ai vu comment l’Esprit Saint peut travailler dans les questions institutionnelles. Nous ne pouvons pas arrêter le travail de l’Esprit. »