Une question difficile

Il y a quelques mois, j’ai eu le privilège de rendre visite à nos paroisses du Malawi. Nous étions rassemblés sous un arbre avec des délégués d’assemblées Frères en Christ (BIC) pour louer Dieu et parler de notre communion mondiale. Après un culte très vivant, j’ai parlé du discipulat dans notre famille anabaptiste mondiale. Puis un pasteur a levé la main et a demandé : « Comment pouvons- nous suivre le Christ dans un contexte de pauvreté, d’inégalité

économique et de grands besoins financiers ? »

C’était une question difficile. Que pouvais-je dire, moi un Latino- Américain relativement aisé, à mes frères et sœurs vivant dans des conditions aussi difficiles ? Au Malawi, il y a environ 4 500 membres baptisés (répartis dans 46 paroisses) et pour tous l’espérance de vie est faible, la mortalité infantile élevée, le VIH/SIDA de plus en plus répandu et les ressources financières insuffisantes.

Tout ceci, outre la pensée des immenses ressources financières dont dispose ailleurs notre famille mondiale, m’est venu à l’esprit alors que je me demandais comment répondre. Mais, après notre rencontre, j’ai réalisé que cette assemblée avait déjà la réponse à la question du pasteur. Quand elle corrige l’inégalité économique, la générosité apporte l’espoir et les moyens pratiques de la surmonter. Quelques jours plutôt, j’avais assisté à un autre culte à Blantyre, l’une des principales villes du Malawi. Au moment de l’offrande, j’ai été stupéfait. Chaque membre (y compris les enfants) s’est levé et s’est avancé pour déposer son offrande. Personne n’est resté assis ! La joie et l’espérance manifestées pendant le culte qui a suivi l’offrande m’a émerveillé. La générosité – générosité financière et générosité spirituelle dans la louange – est la réponse à la question du pasteur

La générosité transcende les inégalités économiques et porte les fruits de l’espérance. Elle prouve qu’une situation peut être surmontée. C’est pour cela que ces deux sujets (l’espérance et l’inégalité économique) sont liés dans ce numéro de Courier/Correo/ Courrier. Grâce à la générosité, notre communauté mondiale peut garder l’espoir dans le contexte des inégalités économiques. Comment cela peut-il se produire ?

Premièrement, nous pourrions « percevoir les choses non seulement comme elles sont devenues, mais aussi comme elles pourraient être » (Jürgen Moltmann, théologien allemand). Notre vie doit être orientée vers l’eschatologie. Nous pouvons regarder vers un avenir révélé par Dieu, un avenir sans inégalité économique, et, dans cette optique, dénoncer, critiquer et chercher les moyens de changer les circonstances actuelles contraires. Comme Johannes Baptist Metz et James Matthew Ashley l’écrivent dans Faith in History and Society, l’imminence d’une fin – lorsque la justice et la restauration deviendront réalité – apporte l’espoir et la force pour transformer la réalité actuelle de l’injustice, de la souffrance et de l’oppression.

Deuxièmement, nous devons résister aux pressions du monde autour de nous, et nous en libérer. La consommation et l’identité basée sur le matérialisme sont des idoles modernes qui alimentent les inégalités. Nous pouvons les détruire par la pratique de la générosité. Moltmann, écrit dans Ethics of Hope : « Ceux qui attendent la justice de Dieu n’acceptent plus la force dite normative de ce qui est un fait, parce qu’ils savent qu’un monde meilleur est possible et que des changements sont nécessaires. Être capable d’attendre signifie résister aux menaces et aux séductions du présent, ne pas se laisser régenter et ne pas se conformer ».

Troisièmement, nous devons trouver une nouvelle identité et une nouvelle communauté. Cette nouvelle identité doit être plus importante pour nous que l’ancienne. « Nous sommes d’abord chrétiens, et seulement après citoyens d’un pays », conclut Moltmann. Cela signifie que nous devons développer une ‘mentalité du Royaume de Dieu’ plutôt qu’un esprit nationaliste. Commençons à penser en tant que citoyens d’une nouvelle nation dans laquelle il n’y a pas de fossé entre riches et pauvres, mais où règne l’égalité économique. Commençons vivre la réalité de ce nouveau royaume parmi nous aujourd’hui. Notre Église est appelée à être un avant-goût de ce royaume. Vivons-le ici et maintenant !

César García, secrétaire général de la CMM, travaille à partir de son siège à Bogotá, en Colombie 

 

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