Unis par grâce depuis 40 ans

« Non pas à nous, ô Eternel, non pas à nous, mais à toi seul la gloire, pour ton amour et ta fidélité ! » Psalm 115/1.

Église Évangélique Mennonite du Burkina Faso

Selon l’esprit du psaume cité, nous voulons exalter Dieu à travers son œuvre au Burkina Faso durant les quarante dernières années. Á Dieu seul soit toute la gloire !

Mais bien avant de parler d’un anniversaire, il faut rendre grâce à Dieu pour ceux qu’il a envoyé il y a longtemps dans cette même région, à savoir l’Alliance Missionnaire Chrétienne en 1937 (CMA). C’est elle qui a défriché le terrain et qui a semé les premières graines de l’Évangile. N’ayant pas pu poursuivre l’œuvre dans la région, en 1976, la CMA a invité l’Africa Inter Mennonite Mission (AIMM) à s’installer dans la région du Kénédougou. Merci à Dieu pour ces pionniers, pour leurs sacrifices.

La mission et les églises aujourd’hui

De 1978 à 2018, environ cinquante missionnaires ont donné leur vie, leur temps et leur talent pour apporter l’Évangile du salut aux populations du Kénédougou. La mission a atteint les peuples Tagba et Dzunn qui se sont appropriés la Parole de Dieu comme étant les premiers destinataires.

Nous voulons leur témoigner notre reconnaissance pour avoir obéi à l’ordre du Seigneur en apportant son message de paix dans notre pays.

L’église, également par la langue Jula, a implantée plusieurs assemblées locales. Chacune, usant de la méthode qui lui convient, a œuvré pour que le Royaume de Dieu vienne parmi les ethnies.

Dès les premières heures, la mission s’est investie dans la traduction de la Parole de Dieu dans les principales langues de la province : Siamou, Sìcìté, Dzùùngoo, Naneregué. Parallèlement à la traduction, nous avons fait de l’alphabétisation dans trois de ses langues.

De nos jours nous nous réunissons régulièrement dans plus d’une vingtaine de lieux de culte avec au moins seize pasteurs formés ; les membres baptisés dans nos paroisses avoisinent le millier de personnes.

Presque tous les chrétiens sont de première génération – la majorité sont issus de familles animistes ou musulmanes – ce qui explique quelques situations de persécution que nous connaissons. Nous avons beaucoup de femmes chrétiennes dont les maris ne le sont pas.

La formation des responsables est une priorité. Ouvert en 2009, le Centre de formation Biblique de Base a répondu de façon immédiate au besoin de formation des serviteurs de Dieu qui savent lire et écrire en langue Jula, afin que ceux-ci ne soient pas exclus de la grâce de servir le Seigneur du fait qu’ils n’ont pas fait l’école formelle occidentale.

Pour célébrer leur 40e anniversaire, des membres de l’EEMBF (l’Église Évangélique Mennonite du Burkina Faso) ont défilé dans le village d’Orodara. Photo : Denis Peterschmitt

De nos jours l’Église est parvenue à une phase d’auto-expansion et d’auto-administration.

Sans se jeter des fleurs, les églises sont restées unies durant ces quarante années. La prière du Seigneur dans Jean 17 a été effective et exaucée en notre sein. Cela ne veut pas dire que nous n’avons pas été éprouvés dans notre communion et dans notre unité, mais Dieu nous a fait la grâce de regarder son intérêt plus que nos intérêts personnels.

Pour une raison de survie, des activités entrepreneuriales ont vu le jour parmi plusieurs membres. Ce qui a été un atout pour un plus grand contact avec les populations de la province pour leur témoigner notre foi et avoir des accès faciles dans des localités pour l’implantation de nouvelles assemblées. En principe l’entreprenariat devrait amener les églises à réaliser la troisième autonomie : financière.

Les jeunes, tant au niveau national qu’au niveau ecclésial, constituent la majorité de la population. Dans nos assemblées locales, la population est jeune. Ils rassurent les aînés : nous avons une relève. Il nous appartient de leur faire confiance et de leur donner confiance.

Les femmes constituent le poumon de nos assemblées locales. Ce sont elles qui œuvrent en silence et en profondeur lorsqu’elles sont convaincues par la Parole de Dieu et par le Saint-Esprit. Nous devons revoir notre culture à la lumière de la Parole de Dieu afin qu’elle ne soit pas un handicap pour que les femmes puissent servir efficacement le Seigneur comme leurs mères dans la Bible.

Au niveau social, durant plus d’une décennie, l’EEMBF s’est investie dans la lutte contre le SIDA, et cela en partenariat avec le MCC. Ce programme nous a permis de faire connaître les valeurs chrétiennes et de partager l’amour et la grâce de Dieu avec des milliers de personnes. Aujourd’hui, sur la base de la confiance fondée en Jésus-Christ, nous accompagnons plusieurs personnes, en l’occurrence des femmes, pour mener des activités génératrices de revenus. Dans notre perspective, nous aspirons dans l’avenir à devenir une ONG pour être plus performant dans l’aide au développement.

Au niveau de la Conférence Mennonite Mondiale (CMM), nos églises ont apporté une contribution significative à la CMM avec des représentants à la Commission Mission, la Commission Paix et la Commission Diacres.

Quoique petite en nombre, l’Église Évangélique Mennonite du Burkina Faso n’est pas vue comme moindre parmi ses sœurs, nous rendons grâces à Dieu pour cette attitude humble.

Les perspectives

Après avoir jeté un regard rétrospectif et vu tout ce que l’Éternel a accompli parmi nous, nous avons crié que jusqu’ici l’Éternel nous a secourus (1 Samuel 7/12). Cela ne suppose pas que nous avons accompli toute l’œuvre. Face à cette reconnaissance, le Seigneur nous dit : ‘Ouvrez vos yeux et regardez les champs; déjà les épis sont blonds, prêts à être moissonnés (Jn 4/35). Face à cette interpellation, nous voulons avouer qu’il reste plus à faire que nous n’avons fait.

Nous situerons nos perspectives dans deux grands domaines.

  1. L’auto-expansion. Le Burkina Faso, de façon générale, et la province du Kénédougou, en particulier, demeurent très peu atteints par l’Évangile du Seigneur Jésus-Christ. Après quarante ans, ce défi demeure entier. Nous devons aller, mais pour y aller, il faut enseigner tout ce qui a été prescrit à ceux qui ont déjà cru. La croissance de l’Église se fera sur la base d’une bonne formation : former et envoyer.
  • Un intérêt pour la cible musulmane. Les aimer et les gagner à Jésus-Christ.
  • Un ministère particulier à l’endroit des enfants.
  • Un ministère tourné vers l’environnement.
  1. L’autonomie financière. Elle est possible, et pour ce faire, nous devons créer une base de confiance mutuelle fondée sur une transparence limpide. Si les membres des églises sont bien enseignés et bien informés sur la gestion de ses ressources, ils contribueront énormément à l’autonomie et à la suffisance des besoins.

Conclusion

C’est une pause pour jeter un regard sur ce que Dieu a fait au travers de chacun de nous, mais surtout nous rendre compte qu’il y a plus à faire que nous n’avons fait.

A la génération future, nous demandons de ne pas voir les prédécesseurs comme des personnes extraordinaires. Ce que nous avons fait, nous l’avons fait avec vous. Nous vous faisons confiance et savons que vous pouvez faire plus que ce que nous avons fait.

À la génération montante nous voulons passer le bâton de relais : il faut le saisir et agir, apporter votre part plus belle que la nôtre. En Jula nous disons « Fen ka bo i la mi ka fissa ni i y e » : Que de toi sorte une chose meilleure que toi-même.

Ala ka duba aw ye !

Siaka Traoré est pasteur et responsable dans l’Église Évangélique Mennonite du Burkina Faso et président de la Commission Diacres de la Conférence Mennonite Mondiale.

Cet article est paru pour la première fois dans le numéro d’octobre 2019 de Courier/Correo/Courrier.

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