Une mission modelée sur le Christ

L’inégalité économique : Explorer notre engagement commun pour le shalom

Un des engagements de notre communion mondiale d’églises anabaptistes consiste à travailler au shalom. Nous croyons à l’engagement pour la justice et au partage de nos ressources, qu’elles soient matérielles, financières ou spirituelles. Pourtant, à cause de notre immense diversité, notre engagement prend différentes formes. Dans le numéro d’avril 2014, les responsables de notre communion analysent la manière dont les anabaptistes abordent la question de l’inégalité économique, et comment nous, en tant que disciples du Christ en quête du shalom, essayons de réduire les écarts de richesse dans nos communautés.

Une mission modelée sur le Christ

L’encyclopédie définit ‘l’inégalité économique’ comme la différence entre individus et populations dans la distribution de leurs possessions, leur richesse ou leur revenu. Le terme se réfère généralement à l’inégalité entre individus et groupes au sein d’une société. Cependant, on peut affirmer que l’inégalité économique n’est pas un hasard. En fait, elle est le résultat de la cupidité et de l’égoïsme humains.

Quelles que soient ses origines, l’inégalité économique est réelle. En Inde, cette inégalité est fortement enracinée dans la société, et une grande partie de la population en souffre profondément.

Il n’y a pas de réponse facile à la question de savoir pourquoi la majorité souffre de l’inégalité économique. Nous n’avons que quelques théories. Bien sûr, les facteurs varient selon le lieu, l’époque et le pays. Un facteur peut être déterminant à un endroit et pas ailleurs.

Néanmoins, la réalité est qu’aujourd’hui, à cause de l’inégalité économique, beaucoup de personnes sont dans une situation désespérée : pas de logement, faim et pauvreté, pas d’accès à l’éducation et aux soins médicaux. Ceux qui sont dans ces situations n’ont pas les mêmes privilèges que les plus aisés, mais souvent les plus riches ne les remarquent même pas. Les riches deviennent plus riches, les pauvres deviennent plus pauvres. L’écart se creuse à un rythme alarmant.

La Bible mentionne très souvent l’inégalité économique et l’écart entre les riches et les pauvres. Dans l’Ancien Testament, Dieu crée un monde parfait et dit aux êtres humains de maintenir une société équilibrée et juste dans ce monde (Gn 1/10, 12, 18, 21, 25). Pourtant, ils se rebellent contre Dieu et sa volonté, et le péché est entré dans le monde (Gn 3/13-19). Le meurtre de Caïn dans Genèse 4 montre comment le péché introduit misère et injustice dans l’histoire humaine, misère et injustice qui se transmettent de génération en génération jusqu’à ce jour.

La pauvreté dresse son hideuse tête dans l’Ancien Testament. Comme il y aura toujours des pauvres (Dt 5/11), Dieu ordonne à son peuple d’être généreux. L’A.T. nous rappelle que Dieu se préoccupe du sort des pauvres. Ne pas suivre ses commandements concernant les pauvres, déclenche sa colère sur nous (Ez 16/48-50 ; Es 1/16-25).

Le Nouveau Testament souligne que Dieu se soucie des inégalités et commande de prendre soin des pauvres et des opprimés. Jésus lui-même s’est identifié à eux quand il a dit : « Le Fils de l’homme n’a pas où reposer sa tête » (Mt 8/20). Il a choisi d’exercer son ministère envers les gens ordinaires, pauvres, opprimés, malades (Lc 4/18-19). Il a dit au jeune homme [riche] de le suivre en renonçant à ses biens en faveur des pauvres (Mt 19/21 ). Il a chassé les changeurs du temple et a condamné leur cupidité et leur hypocrisie (Mc 11/15-17). Les exemples abondent. De toute évidence, le ministère terrestre de Christ a consisté en partie à contester les normes de la société et à souligner ses injustices.

L’Église primitive fournit peut-être le meilleur exemple de ce genre de pratique : une vie dévouée à la justice et à l’égalité entre les personnes. Dans Actes 2/42-47, l’Église primitive est décrite comme un lieu où les biens et les ressources sont partagés équitablement, où les repas sont des occasions de communion fraternelle et de compassion, et où la croissance spirituelle n’avait d’égale que la satisfaction des besoins matériels.

Notre patrimoine anabaptiste nous conduit (Frères en Christ ou mennonites) à nous sentir responsables d’aider les pauvres et les démunis. Au début du mouvement anabaptiste, les croyants pratiquaient l’obéissance dans le domaine financier. Au XIXe siècle, H.B. Musser, responsable Frères en Christ a déclaré : « Je pense qu’il est de notre (l’Église) devoir de nous soutenir mutuellement lorsque nous subissons des pertes [...] Je pense que c’est notre devoir, car l’Écriture dit : ‘Portez le fardeau les uns des autres’ ». Notre héritage anabaptiste nous enseigne clairement – en accord avec l’Écriture – que l’Église a un rôle vital à jouer pour réduire l’écart entre les riches et les pauvres et qu’elle doit travailler à la justice et à l’égalité dans la société.

Quel est ce rôle ? La Bible nous dit que l’Église devrait être le sel de la terre et la lumière du monde (Mt 5/13-16). Elle doit prendre soin des veuves et des orphelins (Jq 1/27). Elle devrait chercher la transformation, non seulement des personnes, mais des structures injustes et oppressives de la société elle-même. En fait, comme l’Église nourrit la foi des croyants, les croyants à leur tour travaillent à la justice dans leurs propres vies, leurs familles et la société en général. Bien qu’elle rencontre des difficultés, l’Église doit toujours être cette voix qui rappelle à la société que Dieu se préoccupe de la justice et de l’honnêteté.

Les Frères en Christ d’Odisha (Inde), tentent de contribuer à la justice et à l’égalité de deux manières. D’abord, nous enseignons la Parole de Dieu. Ensuite, nous entreprenons des projets dans des domaines tels que l’éducation, la création de revenus, la santé et l’hygiène, l’amélioration de l’agriculture, l’aide d’urgence et la réhabilitation. Notre objectif à long terme est d’améliorer les conditions socio- économiques dans notre région.

Nous avons un projet spécifique parmi les castes et tribus répertoriées (intouchables et tribus aborigènes) dans les huit districts de l’État d’Odisha. Ces deux groupes sont les plus pauvres de la société indienne, et l’ont toujours été. Beaucoup d’entre eux vivent au jour le jour. Ils ont de faibles revenus, ils ne peuvent souvent prendre qu’un repas par jour. Nous encourageons les membres de notre communauté à partager le fardeau de ces personnes. Bien sûr, ce n’est pas facile de contribuer à l’équilibre, à l’égalité et à la justice ; c’est un long processus. Pourtant, nous persévérons, nous confiant en l’Esprit pour nous donner force et puissance.

Notre mission est de refléter celle de notre Seigneur Jésus-Christ : les pauvres ont très peu de biens, mais ils sont riches en esprit, en foi, en œuvres et en actes (Jq 2/5). Le Christ lui-même a donné l’exemple de servir les autres et de rechercher la justice, lui qui, malgré ses richesses est devenu pauvre pour nous faire riches. (2 Co 8/09).

Bijoy K. Roul est coordinateur de l’Asie du Sud pour les Frères en Christ d’Odisha (Inde).

 

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