Zimbabwe
Le pentecôtisme est devenu l’expression du christianisme qui connaît la croissance la plus rapide dans le monde aujourd’hui. Les anabaptistes d’Afrique ne sont pas étrangers à cette réalité. Le désir de s’affranchir du contrôle missionnaire, ou mieux ‘la quête de liberté spirituelle’ ont trouvé chez les anabaptistes un moyen d’expression dans la spiritualité pentecôtiste.
En Afrique australe, au cours des 20 dernières années, le climat spirituel s’est rapproché du pentecôtisme et s’est éloigné de l’anabaptisme et des autres églises traditionnelles/principales. Une grande partie du style, de la pensée et de la pratique de l’Église africaine soit s’oppose aux mouvements pentecôtistes, ou se modèle sur eux. Il est difficile pour les églises traditionnelles de rivaliser avec les églises pentecôtistes dont la ferveur spirituelle est si proche de la religion traditionnelle africaine.
Comment cette évolution affecte-t-elle les églises anabaptistes africaines ?
Les anabaptistes doivent s’adapter à la croissance du pentecôtisme dans le contexte africain. Ce n’est pas un mouvement que les églises anabaptistes peuvent faire disparaître ; il est là pour rester.
Au fil du temps, la plus haute expression de spiritualité dans les églises africaines a trouvé son idéal dans la spiritualité pentecôtiste. L’élément essentiel est sa ferveur. De nombreux chrétiens africains considèrent que les églises traditionnelles, avec leur style de foi, de culte et de pratique enseignés par les missionnaires, manquent de ferveur spirituelle. Aujourd’hui, les croyants africains recherchent une expression enthousiaste de leur foi et de leur spiritualité, et le pentecôtisme la leur offre.
Aussi les assemblées anabaptistes voient certains de leurs membres les quitter ou introduire des pratiques venant du pentecôtisme. Les sermons poignants, les prières ferventes, les chants, les danses, les exorcismes, l’appel au Saint-Esprit, et toutes les autres expressions pentecôtistes sont plus attrayantes pour de nombreux chrétiens africains aujourd’hui que l’ambiance froide et figée des cultes couramment observée dans les assemblées anabaptistes. Ces caractéristiques trouvent un écho pour l’Africain moyen, ce qui fait que le pentecôtisme semble plus africain qu’étranger.
Ce que le pentecôtisme semble offrir est une expression véritablement africaine de la foi dans le Dieu trinitaire. Contrairement aux églises traditionnelles africaines, le pentecôtisme croit fermement en la plupart des vérités fondamentales auxquelles adhèrent les chrétiens conservateurs, mais il est parfois erroné dans leur application. C’est donc l’occasion pour les églises anabaptistes d’exprimer ces vérités bibliques et théologiques de manière plus pertinente pour les croyants africains.
Mais là où le mouvement pentecôtiste pose problème, c’est qu’il entraîne la création d’églises dissidentes. L’Afrique est saturée de mouvements pentecôtistes qui deviennent autant de mouvements charismatiques si bien que même certaines églises pentecôtistes s’en séparent. Ces églises dissidentes sont devenues une menace pour la stabilité du christianisme dans la région de l’Afrique australe. Les opposants à la foi chrétienne dans cette région accusent le pentecôtisme de fabriquer de faux pasteurs, de faux prophètes, de faux hommes de Dieu, et de prêcher l’évangile de la prospérité.
Un dialogue entre le pentecôtisme et l’anabaptisme est essentiel. Il faut identifier les points de confluence et les points de divergence. Pour développer un contexte chrétien plus pertinent et plus fervent, il faut que les deux mouvements dialoguent. Le pentecôtisme doit être consolidé par des fondements doctrinaux sur la pensée et la pratique chrétiennes, plutôt que de privilégier l’expression des sentiments et les expériences.
Grâce aux relations œcuméniques, il y a maintenant des dialogues, des séminaires, des formations et des ateliers sur les meilleurs moyens de communiquer la foi chrétienne africaine qui ne soient pas contraire à l’enseignement biblique. Les églises se réunissent pour critiquer certains mouvements dissidents qui cherchent à transmettre un message biblique dont l’expression n’est pas conforme à la doctrine, à la pensée et à la pratique chrétiennes. Des responsables et des enseignants des églises pentecôtistes et des églises missionnaires collaborent pour produire et publier des articles et de la littérature destinées à éduquer les chrétiens sur les valeurs et les pratiques chrétiennes appropriées. La télévision et la radio diffusent des conversations entre pasteurs, responsables et enseignants de divers horizons religieux pour débattre des véritables enseignements chrétiens.
Les anabaptistes doivent prendre conscience de la nécessité de dialoguer avec les mouvements pentecôtistes. Dans le contexte africain, notre désir est de faire l’expérience d’une véritable spiritualité chrétienne africaine. Un enseignement anabaptiste pour bien comprendre les textes bibliques est également crucial. Si nous ne communiquons pas la spiritualité africaine la plus pertinente, associant le meilleur de l’anabaptisme et du pentecôtisme, alors les chrétiens africains seront influencés par des formes de spiritualité mal interprétées.
—Mfakazi Ndlovu est titulaire d’un Bachelor of Arts en théologie, d’un diplôme de troisième cycle en gouvernance d’entreprise et d’une maîtrise en administration. Il est enseignant et a été doyen de l’Institut biblique Ekuphileni, un collège biblique de l’Église Frères en Christ (BICC) au Zimbabwe, ainsi que professeur assistant au Collège théologique du Zimbabwe. Il travaille avec la BICC Zimbabwe en tant qu’administrateur.